« Janvier 2014. J’atterris à Bangui, capitale de la République centrafricaine. Sans idée précise, je me rend au camp de réfugiés de M’Poko.
Des carcasses d’avion jonchent le sol. Les tentes de Médecins Sans Frontières se dressent tout autour de moi. Les maladies poussent comme des champignons. Un médecin belge me sert de guide.
Je m’aventure dans une salle d’attente à ciel ouvert. C’est le jour de la visite médicale des femmes. Etourdi par la vétusté des lieux, je me prends les pieds dans une planche. Ma chute en fait rire plus d’unes. Je reprends mes esprits et mon regard se pose sur trois femmes. Adossées à une bâche de MSF, elles attendent leur tour. Elles sont belles, photogéniques. Leurs regards me transpercent. Je me saisis de mon appareil pour immortaliser l’instant. Nous ne nous parlons pas, un simple hochement de tête suffit.
C’est une photo forte et douce à la fois. Deux d’entre elles détournent le regard de l’objectif, par pudeur peut-être. Celle de gauche le regarde fixement. Rien n’est calculé. Tout est pris au vol.
Ce cliché sort du lot. Un instant de joie arraché à un monde de chaos, de persécution, de pauvreté... »
Propos recueillis par Laurence Morandini